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En ouvrant les portes de l’hôtel Duvivier

Dans la rue de l’Armillerie, se trouve une vaste demeure dans laquelle est née et a grandit Edwige Duvivier, fondatrice de la congrégation de Sainte-Marthe, aujourd’hui école Notre-Dame des Champs.

Cette maison fut construite sur les ruines des maisons de Catherine Vallier, veuve de Guillaume Lodot, châtelain de Peyrins, et d’Antoine de Monteil, que l’on trouve, dans les archives, vivants à Romans à la fin du XVe-début du XVIe siècle. Plus tard, elle s’ouvrait sur un jardin établi au-dessus des arceaux d’un magasin qui avait appartenu à la famille Guérin. Sautons quelques étapes pour nous projeter au XVIIIe siècle en compagnie de la famille Duvivier (aussi orthographié « du Vivier »).

Amédée Philippe Duvivier, magistrat, conseiller au parlement de Grenoble, et son épouse Anne Marguerite de Vellein d’Oncieux, arrière-petite-fille de Romanet Boffin, fondateur du chemin de croix et du calvaire de Romans, étaient alors propriétaires de cette demeure. En 1785, Edwige Duvivier y vit le jour et dès son plus jeune âge, ses parents s’appliquèrent à lui inculquer l’amour et la crainte de Dieu, ce dont elle ne se plaignit jamais et forgea toute sa vie. Alors qu’elle venait d’entrer dans sa dix-huitième année, elle voulut entrer au monastère de la Visitation de Romans qui venait de se reformer mais son père refusa, voulant la garder auprès de lui. En 1813, elle fonda une école gratuite qui s’installera ensuite dans les bâtiments de l’ancien hôpital Sainte-Foy, et que l’on connaît aujourd’hui sous le nom d’école Notre-Dame des Champs.

Quel était l’usage de la magnifique pièce voûtée que l’on trouve à l’étage ? L’on sait que la famille Duvivier était très pieuse mais cette question reste encore en suspens.

Sous la Terreur, M. Duvivier, n’hésitait pas à recevoir, dans sa propre maison, plusieurs prêtres persécutés et le Père Célestin Blain y trouva même, au commencement de l’année 1794, un refuge permanent. Alors que les églises étaient fermées et les tabernacles vides, la maison possédait une chapelle. Nous pouvons encore la voir aujourd’hui, à l’étage, couverte d’un ciel bleu, et dont les traces d’appui de l’autel sont encore visibles sur le mur du fond. Dans une lettre où elle retrace ses souvenirs, Edwige Duvivier se rappelle : « Par nos grands vicaires, il nous fut permis de dresser, toujours dans le secret, des autels chez nous, d’y posséder habituellement le Saint-Sacrement, et d’y entendre le saint Sacrifice de la messe. Ces petites églises s’appelaient oratoires. »

Dans les combles, autrefois habités, l’on peut voir des restes de belles peintures murales et l’on peut supposer qu’une bonne partie de la demeure était ainsi décorée.

Edwige Duvivier mourut le dimanche 1er février 1835, à l’âge de quarante-neuf ans. dès que la cloche du monastère et celles de Saint-Barnard eurent annoncé le deuil de la Congrégation, le peuple de Romans s’écria d’une voix unanime : « La Sainte est morte ! » Son corps fut exposé au milieu du chœur et ne cessa d’être visité par une foule désireuse de rendre un dernier hommage à celle qui avait passé sa vie en faisant le bien.

L’info en +

Amédée Philippe Duvivier, sauveur de l’église Sainte-Croix. Comme nous l’avons vu, c’était un ancêtre de son épouse qui avait fondé le calvaire de Romans. À la fin de la Révolution française, des Frères Chartreux de Bouvantes avaient fait l’acquisition du couvent mais l’église contiguë ne leur appartenait pas. Vendue une première fois aux sœurs Junillon et Berthoin, elle l’avait été, une seconde fois, en 1796, à un autre habitant de Romans, nommé Jean-Pierre Dépit. Celui-ci, ne sachant comment l’utiliser, s’apprêtait à la démolir et ce fut alors que M. Duvivier intervint. Le 18 février 1797, il racheta l’édifice qu’il paya comptant, et, sans délai, il en remit les clefs aux Chartreux tout en s’en réservant la propriété. Plus tard, sa veuve et ses enfants, fidèles interprètes de ses intentions, cédaient tous leurs droits à l’évêque de Valence, devenu acquéreur du couvent et de ses dépendances. C’est ainsi que l’église Sainte-Croix fut sauvée d’une entière destruction grâce à la famille Duvivier.

Cet article de Romans Historique est aussi paru dans le Dauphiné Libéré : https://www.ledauphine.com/culture-loisirs/2021/08/07/en-ouvrant-les-portes-de-l-hotel-duvivier

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