Jean-Yves Baxter Lire →

L’affaire de la malle sanglante

Le 13 septembre 1929 au matin, un cadavre fut trouvé dans une malle d’osier, à la consigne de la gare de Lille, dans le Nord.

C’est une odeur désagréable qui alerta les employés de la gare. Une mare de liquide rougeâtre et malodorant apparut soudainement lorsqu’ils tirèrent la malle pour l’écarter des autres colis. Il ne leur fallut pas longtemps pour faire sauter les deux petites serrures, soulever le couvercle et découvrir le cadavre d’un homme ligoté. Il était vêtu d’un complet gris à rayures et une serviette de cuir foncé était placée près de lui. Les policiers accourus en tirèrent un portefeuille et l’identité du malheureux fut immédiatement connue : Frédéric Auguste Rigaudin dit Rigaud, 1 place Émile Landrin, Paris. Il est né le 3 octobre 1896 à Romans, de Frédéric Rigaudin et Blanche Marie Blanc, demeurant 6 place Jacquemart.

Sa mère retrouvée morte étranglée cinq mois auparavant !

Sa mère était aussi originaire de Romans où elle est née le 20 novembre 1859, et hasard troublant, elle avait été trouvée étranglée dans sa chambre, au septième étage d’un immeuble parisien, le 25 avril 1929, et jamais on n’a pu identifier son meurtrier. Elle vivait avec son fils, dans un petit logement de la place Émile Landrin et c’est lui qui l’avait découverte en rentrant déjeuner. L’appartement en désordre semblait indiquer que le vol avait motivé le crime. Un locataire témoigna que vers onze heure trente, il croisa un individu assez suspect dans l’escalier, âgé d’une vingtaine d’années et de corpulence moyenne. On sait par ailleurs que la malheureuse fréquentait les milieux anarchistes mais la police ne parvint pas à identifier le coupable.

L’enquête sur la mort de Frédéric Rigaudin dura plusieurs mois et eut de nombreux rebondissements.

Le lundi 9 septembre, à huit heures, Rigaudin est sorti de chez lui et est allé chez M. Dunner, le fourreur de la rue Chabanais, pour se faire consentir un prêt. Il y est resté jusqu’à neuf heures et en est parti, lesté de mille quatre cents francs, pour aller à la mort. L’autopsie a prouvé que son estomac était vide d’aliments donc on peut affirmer qu’il a été assassiné entre neuf heures et midi.

Un tailleur en faillite, dénommé Michel Almazoff, fut longtemps soupçonné d’être l’auteur du crime et resta, de ce fait, emprisonné pendant six mois avant de bénéficier d’un non-lieu et d’être remis en liberté. On avait trouvé chez lui un coton ensanglanté, des traces de sang sur la porte de son arrière-boutique et des tâches sur un pantalon et une serpillière. Mais surtout, Rigaudin fut son comptable et ils avaient passé l’après-midi du 8 septembre à jouer à la belote avec d’autres personnes. Pourtant, il ne fut pas prouvé qu’Almazoff et Rigaudin aient pu se rencontrer après le passage de ce dernier chez le fourreur Dunner.

En 1932, Almazoff réclama un million de francs de dommages et intérêts à la justice et on ne sut jamais qui avait assassiné Frédéric Rigaudin.

L’Info en +

Cette affaire eut un énorme retentissement et jamais un autre Romanais que Frédéric Rigaudin n’était, jusque là, autant apparu dans la presse nationale et régionale. De nombreux journaux en ont abondamment parlé : Le Matin, Le Petit Journal, Le Populaire, L’Action Française, Le Temps, L’Écho d’Alger, L’Ouest Éclair, Paris Midi, Le Soir, L’Écho du Nord… Mais la palme revient au quotidien national “Le Journal” qui tirait, dans ses meilleures livraisons, à un million d’exemplaires. Ce journal ne fit pas moins de trente unes sur cette affaire, entre le 14 septembre 1929 et le 5 juillet 1930 ! Il rendit compte de toute l’enquête, de tous les témoignages, des reconstitutions et du procès, et publia de nombreuses photos des protagonistes, de la malle et d’autres pièces à conviction. En avril 1929, il avait déjà fait deux unes au sujet de la découverte de la mère de Frédéric Rigaudin, morte étranglée dans un petit appartement du quartier de Ménilmontant, à Paris, publiant même un portrait de la victime.

Cet article de Romans Historique est paru dans le Dauphiné Libéré : www.ledauphine.com/drome/2017/08/02/l-affaire-de-la-malle-sanglante

1 Comment on "L’affaire de la malle sanglante"

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  1. Denis FERRADOU dit :

    Merci Jean-yves, pour cette rocambolesque affaire… Sans coupables…!

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