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Histoire du bâtiment du Conservatoire de Musique et de Danse

Histoire du bâtiment du Conservatoire de Musique et de DanseCe quartier, longé par le cours d’un ruisseau qui avait reçu le nom de Tortorel, était jadis très animé et habité par la bonne bourgeoisie de la ville de Romans-sur-Isère.

Nicolas Courtin y possédait le vaste tènement de maison et jardin délimité au sud et à l’est par la rue Courtin (aujourd’hui rue de Loulle et rue Morin), à l’ouest par la rue Giraud (aujourd’hui prolongement de la rue de la Pérollerie) et au nord par la rue de la tour Morin (aujourd’hui rue du Secret).

Le 29 novembre 1778, l’Intendant annonce l’arrivée et la résidence d’une brigade de cinq hommes de la maréchaussée. Elle est logée dans la maison de Nicolas Courtin.

Au commencement de la Révolution, la gendarmerie, renforcée de cinq cavaliers du 14è régiment, ayant été casernée dans une partie des bâtiments du couvent Saint-Just, la maison Courtin fut convertie en une loge maçonnique.

Sans aucune preuve mais en l’absence de toute autre explication, il y a tout lieu de penser que la rue du Secret a ainsi été nommée parce que située derrière le bâtiment qui servait de loge maçonnique (elle n’était pas encore dénommée ainsi sur le cadastre de 1825).

A une date non connue, Etienne Ferdinand Charles acquiert cette propriété et le 25 mai 1832, Antoine Sébastien Jourdan, propriétaire rentier domicilié à Anjou, Isère, mandataire de Etienne Ferdinand Charles père et François Charles, fils aîné, négociants domiciliés à Romans, vend à Etienne Victor Chartron, négociant demeurant à Saint-Vallier, leur maison située à Romans, quartier de Tortorel, “avec une filature à soie, tous les ustensiles et accessoires, cuves et vases vinaires qui s’y trouvent”, au prix de 5 000 francs.

Le bâtiment abritant, depuis 1837, l’école des Frères de la Doctrine chrétienne, place Sabaton (à l’emplacement actuel de la médiathèque et de Fanal), devient insuffisant et le Conseil municipal réuni le 5 mai 1866 délibère que “MM. Clément, Roux et Guérin sont chargés de vouloir bien rechercher, dans la paroisse Saint-Barnard, un local à louer ou à acquérir dans les prix de 18 000 à 25 000 francs pour l’affecter à une succursale de l’école dont il s’agit.”

C’est ainsi que le 28 septembre de la même année, Pierre Ferdinand Derne, négociant, élu président du Tribunal de Commerce en 1859, 1861 et 1866, déclare prendre l’engagement de vendre à la ville la maison, jardin et toutes les dépendances qu’il possède au quartier de Tortorel moyennant la somme de 25 000 francs, en précisant toutefois qu’il “se réserve tous les meubles, effets mobiliers, glaces et généralement tout ce qui se trouve dans la maison à l’exception du fourneau de la cuisine.” Nous ne savons pas à quelle date il avait fait l’acquisition de la propriété.

Le 29 octobre 1866, l’architecte de la ville dresse la description suivante de la propriété de M. Derne : “La propriété située entre la rue Courtin et les maisons qui bordent le côté est de la rue Perrolerie, se compose 1° d’une cour d’entrée d’une superficie de cent cinquante mètres carré. Cette cour donne un accès direct au rez-de-chaussée de la maison et contient un escalier extérieur. Par le dit escalier, on monte soit au jardin, soit au premier étage de l’habitation. 2° d’un jardin élevé au-dessus du sol de la cour, de deux mètres environ. Ce jardin est pourvu d’un bassin avec jet d’eau. La contenance du jardin est de trois cent soixante quatre mètres carré. 3° d’une maison ayant jour au midi sur la cour et le jardin, au levant et au nord sur la rue Courtin, au couchant et au nord-ouest attenante à des maisons sauf dans la partie bornant la petite cour. Ce bâtiment possède un rez-de-chaussée, un premier et un deuxième étage. Sa superficie est de trois cent quatre vingt cinq mètres carré. Cette superficie est occupée ainsi : a. au rez-de-chaussée, une remise donnant sur la cour, un magasin et plusieurs caves. Le magasin et les caves sont éclairés et aérés par des fenêtres dont l’appui est à deux mètres du sol aussi bien sur le jardin que sur la rue Courtin. b. au premier étage, un vestibule, un salon, un petit salon, une salle à manger faisant suite au petit salon, une cuisine accompagnée de vastes alcôves, un escalier et des couloirs. L’un des couloirs possède une sortie sur la rue Courtin. c. au deuxième étage, six chambres à coucher et des cabinets de toilette. 4° enfin, d’une petite cour de service communiquant avec l’écurie et donnant du jour aux étages. La construction du bâtiment est généralement bonne et dans un état très satisfaisant. Les pièces du premier et deuxième étage sont très confortables et fraîchement décorées. La hauteur de traverse est au-dessus de l’ordinaire.”

A ce moment de l’histoire du bâtiment, il est important de noter que l’aile nord-sud (à droite en regardant face à la grille d’entrée actuelle) n’existe pas. Il n’y a qu’un bâtiment qui est celui que nous voyons de face en entrant dans la cour et dont nous parlons depuis le début.

De nombreux travaux d’aménagement sont réalisés pour installer l’annexe de l’école des Frères de la Doctrine chrétienne dans ce bâtiment : au rez-de-chaussée sont aménagées trois classes, une cave et un dépôt, au 1er étage, une chapelle, une sacristie, un dépôt, une salle d’exercices et un parloir, et au 2è étage, des cellules (chambres), des ouvertures (portes, fenêtres) sont fermées et des nouvelles sont percées, la balustrade provient de la démolition du grand escalier de la cour lequel a été totalement enlevé. De plus, une partie du jardin est mise de plain-pied avec la cour (donc au même niveau que la rue) de façon à assainir les classes du rez-de-chaussée.

Par délibération du 22 juillet 1871, le Conseil municipal demande le remplacement des instituteurs congréganistes par des laïques et le 12 septembre 1871, la ville adresse un courrier à Monsieur le Supérieur des Frères lui signifiant que “le nombre des Frères des écoles chrétiennes ayant la qualité d’instituteurs communaux ayant été réduit à trois, à moins toutefois que vous préfériez tous quitter la localité, les trois qui resteraient iront occuper le local de M. Roch, instituteur libre, côte Jacquemart, et remettront entre nos mains les clés de la maison rue Tortorel après en avoir enlevé tout ce qui peut leur appartenir personnellement.”

Cette décision soulève une forte opposition et de nombreuses pétitions, et le préfet décide finalement que les Frères conserveront la jouissance de la maison Derne.

En 1875, il est décidé de construire de nouvelles classes et le 28 décembre de la même année, le préfet de la Drôme adresse un courrier à la ville de Romans demandant que “comme le travail projeté prendra un certain temps et que les classes actuelles sont insuffisantes pour recevoir tous les enfants qui fréquentent l’école, il est absolument nécessaire que la ville loue la maison Giraud pour tout le temps que dureront les travaux.”

La maison de M. Giraud est située rue Giraud, juste derrière l’école (cette maison est toujours visible place Gondoin), et le 24 mars 1876, il est convenu qu’il la cède, à titre de bail à la ville de Romans, pour une durée de six ans, au prix de 800 francs par an.

Le 7 mars 1877, est procédé à l’adjudication publique des travaux pour l’agrandissement de l’école et la réception définitive des travaux a lieu le 15 mai 1879.

Ce nouveau bâtiment – il s’agit de l’aile nord-sud que nous voyons à droite en entrant dans la cour – est ainsi décrit : “longueur du nord au midi : 14,40 mètres, largeur de l’est à l’ouest : 6,80 mètres, hauteur : 12,60 mètres, au rez-de-chaussée : une classe de 98 m2, au premier étage : deux classes de 48 m2 chacune, au deuxième étage : 2 classes de 48 m2 chacune, on accède aux classes du premier et du deuxième étages par un escalier dans l’ancien bâtiment (le grand escalier que l’on utilise encore aujourd’hui) et au moyen de deux galeries sur la façade du nouveau bâtiment.” Ce nouveau bâtiment est construit en pierre de taille de grès prise aux carrières des Balmes.

Le Conseil municipal réuni le 24 mars 1881 décide que “l’école communale de la rue Tortorel soit confiée à des instituteurs laïques à partir du 25 avril, jour de la rentrée des classes, après les vacances de Pâques.”

Le bâtiment deviendra ensuite une école de garçons, une école de filles, une école supérieure de jeune filles puis un Conservatoire de Musique et de Danse.

Sources : Archives municipales de Romans-sur-Isère – 4 M 18, Ecole Tortorel, 1864-1938 – 1 D 16, Registre des délibérations municipales, 1862-1871 – 1 D 18, Registre des délibérations municipales, 1877-1882 – 10 Fi 098, Plan d’alignement de 1821, Cinquième feuille du plan dite Grand place, Fontaine couverte, 1821 – 10 Fi 13, Plan cadastral parcellaire de 1825, Section F du centre ville – 10 Fi 047, Cadastre révisé pour 1972, Section BK – Annales de la Ville de Romans, Ulysse Chevalier, 1896 – Notes historiques sur la ville de Romans, Ulysse Chevalier, Ulysse, 1880 – Essais historiques sur les hôpitaux et les installations charitables de la ville de Romans, Ulysse Chevalier, 1865 – Mémoires sur la ville de Romans, Dochier, 1812 – Armorial Historique de Romans, Ulysse Chevalier, 1887

3 Comments on "Histoire du bâtiment du Conservatoire de Musique et de Danse"

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  1. Jean-Yves dit :

    Je n’ai aucune information à ce sujet et je vous suggère de poser la question directement à la mairie.

  2. Balestrat ch. dit :

    j’ai entendu parlé de sa destruction lors d’une réunion avec l’ancien Maire adjoint (M Dressin) quand est-il aujourd’hui ?
    j’habite juste devant…..et aimerait connaitre le devenir de ce bâtiment.

  3. jacquon dit :

    très interessant en tant que professeur d’enseignement artistique bravo pour cette historique que je ne connnaissais pas

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